Du 23 au 25 juin dernier, le Bourget avait mis sa parure d’été pour accueillir LE rendez-vous de l’aéronautique et de l’espace. Et quand le célèbre aéroport d’aviation d’affaires s’habille façon parc d’attraction, difficile de rester de marbre — sans même être un fan d’engins volants en tout genre. Radio Londres vous emmène faire un tour sur le tarmac.
Dimanche 25 juin, 11h. Il y a déjà foule devant les portes de l’aéroport du Bourget en ce dernier jour de salon. Les agents de sécurité fouillent les sacs par deux fois et nous intiment de boire une gorgée de nos bouteilles pour vérifier que nous ne transportons pas de produits inflammables : état d’urgence oblige.
A peine les portes passées que nous apercevons déjà au loin les immenses fusées Ariane. Elles se dressent là fièrement toute l’année au musée de l’air et de l’espace, mais dans cet estival ciel francilien, entourées d’hélicoptères et d’avions en tout genre, elles semblent avoir une résonance toute particulière. Les astronautes en herbe trépignent d’impatience d’aller les voir de plus près et une fois arrivés au pied de l’Ariane 5, ils lèvent la tête à s’en décrocher la nuque en espérant très fort qu’eux aussi, un jour, chatouilleront les étoiles.
On ne sait déjà plus tout à fait où donner de la tête tant tout semble attirer l’œil. Et pour rien n’y faciliter, commencent, en début d’après-midi, les démonstrations de vols. C’est alors tout naturellement que des dizaines de milliers de nez pointent vers le ciel. Les bouches se font béates. Ce n’est pas tous les jours qu’on voit un hélicoptère voler à l’envers et faire des marches arrières…
Le Salon du Bourget fait honneur à son deuxième nom : le Paris Air Show. Le ciel déjà drapé de nuages se zèbre au rythme d’acrobaties toutes plus folles les unes que les autres.
A 13h57, le salon entier se fait muet quand un Rafale (Dassault Aviation) déchire les airs. « C’est quoi ce bruit ? » lancent certains, quelque peu paniqués. Tout le monde s’arrête et lève les yeux haut dans le ciel. A cette distance, même en zoomant avec un appareil photo, le Rafale a la taille d’un jouet. Un jouet qui dépasse aisément la vitesse du son (340 mètres/seconde). Et les avions de l’armée de l’air fascinent toujours autant.
Airbus et Boeing se rendent coup pour coup
Les deux géants ont, en toute logique, dominé les annonces. L’européen Airbus semblait avoir pris de l’avance dans le secteur des monocouloirs — avions avec deux rangées de sièges taillés pour les court-courriers mais également capable d’atteindre la Côte Est des Etats-Unis ainsi que le Moyen-Orient depuis l’Europe — avec l’A321 NEO (dont le premier modèle a été délivré cette semaine à la compagnie Virgin America). Boeing a répondu ce dimanche avec l’annonce du 737 max 10.
Toujours plus grand, toujours plus loin ? C’est la tendance actuelle. L’imposant Airbus A380 fend — non sans grâce — les airs en ce dimanche ensoleillé alors que l’avionneur européen vient d’annoncer sa version augmentée : l’A380Plus. Airbus promet 80 places supplémentaires pour atteindre 575 sièges, et une économie de 4% de kérosène par siège grâce à de nouveaux ailerons hauts de 4 mètres 70. L’objectif est, à terme, de réussir à relier Londres à Sydney sans escale.
Confortablement installés à l’ombre de tonnelles placées en hauteur pour encore mieux apprécier le spectacle, les invités dégustent des glaces. Les autres longent les murs, casquettes visées sur la tête pour éviter l’insolation. Mais quand vient l’heure de la patrouille de France, plus personne n’ose se plaindre, le spectacle est trop beau. En formation resserré, avec seulement quelques mètres entre chaque aile, beaucoup retiennent leur souffle.
L’espace, accélérateur de sciences
C’était l’attraction phare du salon : l’ancien avion de la chancelière allemande Angela Merkel transformé en fantastique laboratoire. Cet A310 d’Airbus est le seul en Europe capable de créer la gravité zéro : le Zéro G. En faisant des paraboles successives (montée puis descente a plus de 70°), ce dernier parvient — sans avoir à quitter l’atmosphèr — à « éliminer » la gravité durant des intervalles de 22 secondes (durée maximale d’une parabole). Mais à quoi ça sert ? A faire progresser les sciences à vitesse grand V. Pour notre guide du Centre National d’Etudes Spatiales (CNES), « le Zéro G ce n’est pas une finalité, mais plus une contrainte ». En effet, la force de gravité masque des phénomènes physiques. Et pour l’instant, l’A310 Zéro G est sur Terre la meilleure manière de s’en affranchir. C’est d’ailleurs à bord de cette avion que les astronautes appréhendent ce qui les attend dans l’espace.
La station spatiale internationale (ISS) reste tout de même le laboratoire préférentiel, un véritable « accélérateur de sciences », d’après un membre de l’équipe de Thomas Pesquet. Le principe est toujours le même : si les tests marchent là-haut, alors ça peut marcher partout. Si l’on est capable d’établir une connexion permanente avec un satellite en orbite alors on doit pouvoir contacter n’importe quel endroit sur Terre peu importe les conditions. L’espace crée des défis à résonance terrestre. Comment recycler l’eau ? Comment tester avec rapidité et précision la qualité de celle-ci ? Aujourd’hui plus que jamais, l’espace ouvre de nouveaux horizons.
Alors qu’à la sortie du salon, un jeune garçon du Blanc-Mesnil attrape le bras de sa mère et pointe le ciel en s’exclamant « Regarde maman, il tourne, il tourne ! », on ne peut qu’attendre avec impatience l’été prochain, pour un nouveau séjour le nez dans les nuages.
Notre vidéo de reportage au Bourget :
Texte : Matthieu SLISSE
Photos : Mathis BONNANT-MICHEL
Vidéo : Matthias DIRINGER
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